Un an et demi après sa première exposition "légumière" dans le mythique Espace Salvador Brassens, Nicolas Vercellino a livré lors de cette splendide exposition tant attendue l'ensemble de son imagerie, diverse et magnifique. L'heure n'est plus aux interrogations, entamant sa deuxième année de photographe professionnel, Nicolas Vercellino affirme un talent irréfutable, une personnalité artistique puissante et profonde. Le public, fort nombreux, a papilloné parmi les tirages épinglés sur toutes les surfaces des murs. Architectures, chateau de Versailles, sites industriels, lignes, impressions, recoins, panoramiques. La présence humaine est rare, fugace, quelques traces énigmatiques d'un passage éphémère et dérisoire auprès de ces matériaux impérissables. La figure humaine semble effacée pour laisser l'ouvrage nous émouvoir dans sa pureté formelle. Ou, peut-être, pour rendre hommage à ceux qui ont construit de leurs mains ces merveilles. Les ouviers du bâtiment sont là. Leur fierté silencieuse en clair obscur. Vercellino sait les photographier, il reforme le lien entre les ouvriers et les murs, les outils, les ateliers. Le public, ébahi, se rend compte que ces espaces que nous arpentons, souvent sans y porter attention, n'appartiennent pas seulement à notre confort ou notre humeur du moment, ils existent par les hommes qui en conçoivent et accomplissent l'édification.
Les photos de Vercellino sont soigneusement construites, la composition, les contrastes cultivent le léger décalage, le déséquilibre subtil hors des conventions du genre. Maîtrisant parfaitement les règles académiques de la photographie, Vercellino en évite élégament les pièges , point de pittoresque ni de modernisme convenu. Comme Matisse, il distord la réalité d'un coup de pouce poétique et nous laisse face au spectacle d'un monde qui est le sien, mais aussi le nôtre.

Philippe Amador